Après plus de trois mois de négociations, les deux principaux partis indépendantistes de Catalogne sont enfin parvenus à un accord de principe pour former un gouvernement de coalition.
9 jours avant la date-butoir pour doter la Catalogne d’un nouveau président, la Esquerra Republicana de Catalunya (ERC) et le groupe Junts per Catalunya (JxCat) ont su surmonter les difficultés qui avaient gelé les négociations depuis les élections qui avaient eu lieu sur ce territoire, le 14 Février.
Une alliance entre les deux mouvements était déjà apparue en 2015 (Junts Pel Si), et c’est à elle à que la Catalogne doit le référendum de 2017 pour l’indépendance. Son résultat avait été à la hauteur de la répression espagnole qui l’avait suivi.
L’époque ultérieure avait été marquée par une rupture du dialogue entre les deux grands courants indépendantistes, due notamment aux divergences stratégiques sur la politique à mener vis-à-vis du gouvernement espagnol. L’ERC avait en effet entamé des négociations avec Madrid, alors que l’autre mouvement restait en retrait sur le sujet. Depuis, les tensions ont perduré entre les deux organisations, dont plusieurs des principaux responsables ont été emprisonnés ou sont partis en exil.
Aux élections du 14 février 2021, l’ERC, légèrement en tête devant Junts, a inversé le rapport de forces prévalant jusqu’alors au sein des indépendantistes.
Le 8 mai, l’ERC avait cessé toute discussion avec Junts, critiquant le rôle du Conseil pour la République catalane, sorte de gouvernement catalan parallèle lié à Junts et créé par Carles Puigdemont, l’ancien président catalan de 2017. Artisan majeur de la déclaration d’indépendance, il est exilé en Belgique depuis la répression de la sécession.
L’approche de la date butoir du 26 Mai, ainsi que la pression populaire pour former un gouvernement, auront fini par décider les deux grands mouvements indépendantistes à gouverner de nouveau en coalition. Une décision consolidée lors d’une conférence de presse le 17 Mai où Pere Aragonès (ERC) et Jordi Sánchez (Junts) ont annoncé l’entrée en fonction de la nouvelle législature jeudi 20 mai, avant la promesse d’intensifier les efforts en faveur de l’indépendance de la Catalogne.
L’acteur principal de la Gauche Républicaine indépendantiste dans ce consensus, jusque-là président par intérim du gouvernement catalan autonome, se retrouve à la tête de l’Exécutif suite à l’accord négocié. Les 14 ministères du Govern catalan doivent être répartis à parts égales entre les deux formations.
» Un gouvernement fort, qui mise sur le dialogue et la négociation pour résoudre le conflit catalan à travers l’autodétermination » selon les porte-parole des deux organisations.
Si ERC, en position de force, souligne son ouverture à la discussion, certains de ses interlocuteurs d’hier, comme le troisième parti indépendantiste, la CUP (Candidatura d’Unitat Popular), avec qui elle avait établi un pré-accord de gouvernement, en sont pour leurs frais. Quant au gouvernement espagnol de Pedro Sánchez qui avait entamé des discussions avec l’ERC, il ne voit dans les positions actuelles du nouveau gouvernement de Barcelone que le risque de reproduire les impasses du passé.
Au vu des objectifs affichés clairement par le gouvernement catalan autonome, comme le droit à l’autodétermination ou encore la libération de 12 politiques catalans condamnés à des peines allant jusqu’à 13 ans de prison pour leur rôle dans le référendum d’indépendance de 2017 déclaré « illégal » par l’Etat espagnol, reste à voir si Barcelone pourra trouver un terrain d’entente avec Madrid, tout en restant cohérent et en pérennisant le soutien populaire à l’Indépendance.